Négocier, coopérer, persuader… le propre de l’homme ? Plus vraiment ! D’après une étude publiée dans le journal Science, les ingénieurs de Meta, société mère de Facebook, ont développé une intelligence artificielle capable d’atteindre des « performances de niveau humain » dans le plus emblématique des jeux de négociation : Diplomacy.
Un groupe de chercheurs de la Meta Fundamuntal AI Research Diplomacy Team (FAIR), affiliée à plusieurs institutions scientifiques américaines, a crée une intelligence artificielle capable de battre en ligne des adversaires humains à Diplomacy, jeu de négociation mondialement connu. La prouesse est d’autant plus impressionnante, que l’identité artificielle du système s’est avérée également insoupçonnable pour les autres adversaires, eux bien humains.
Diplomacy reste aujourd’hui l’un des jeux de société les plus complexes, l’objectif pour les joueurs étant de négocier pour leur camp les meilleurs accords possibles au rythme d’échanges diplomatiques, d’affrontements bien pesés et de trahisons savamment orchestrées. Pour gagner, il faut en temps réel à la fois savoir négocier (dialoguer), faire preuve de coordination tactique (analyser) et évoluer sur le plateau de jeu (bouger).
Ce nouveau système d’IA baptisé Cicero a donc été capable de s’imposer dans une partie sans que son origine virtuelle soit suspectée. « Le programme informatique a ainsi participé à 40 parties en ligne entre août et octobre 2022, précise Audrey Dufour dans La Croix, avec des joueurs humains qui ne savaient pas qu’ils affrontaient une IA. Résultat, Cicero a fini dans le top des meilleurs joueurs, et deuxième au classement des 19 joueurs qui ont participé à au moins cinq parties ». Un seul joueur parmi 82, semble s’être douté de la supercherie.
Cette combinaison de traitement du langage naturel et de raisonnement stratégique est une première pour une IA jouant à un jeu. Pour beaucoup de médias, elle constitue une percée scientifique dans la mesure où Cicero peut à la fois bien jouer au jeu et mener des négociations informelles.
Après avoir fait la différence aux échecs, au jeu de go, au poker, à Starcraf II ou encore Quake 3, l’IA tire donc aujourd’hui son épingle d’un jeu de négociation, et non des moindres. Un défi qui encore hier, paraissait impossible à surmonter tant les niveaux interdépendants et simultanés de négociation, de coopération et de compétitions étaient nécessaires pour gagner.
S’il s’agit là d’une avancée majeure dans le domaine de l’intelligence artificielle. Elle pose aussi la question qu’anticipait déjà tous les grands romans de science-fiction : jusqu’où déléguer notre « intelligence » sans perdre le contrôle, y compris celui de nos vies ? Nous n’en sommes pas encore là ! Car l’IA ne peut anticiper les imprévus que nous réserve l’avenir, ni même les effets de surprise dont nous avons aussi parfois le secret.
C’est là la limite du jeu : la vie réelle n’en est pas un… Les vraies négociations non plus !