La technique de la porte au nez : un grand classique de la manipulation mais qui a toujours cours aussi bien dans une vente que durant une négociation. Pour obtenir ce que l’on souhaite, il s’agit tout simplement d’émettre une première demande excessive sans pour autant être incongrue ou fantasmagorique. Puis devant le refus de l’interlocuteur, lui en proposer une seconde (conforme à l’objectif initialement fixé) et le piège fonctionne… Décryptage.
Parfaitement reconnue et éprouvée en matière de psychologie sociale, la technique de la porte au nez est une variante du pied dans la porte. Son principe : faire précéder une demande plus ou moins coûteuse par une demande excessive et cela dans un laps de temps réduit. Ce qui a pour effet de faire accepter la seconde. La manipulation paraît tellement évidente et connue de tous, que l’on pourrait s’en croire à l’abri. Et pourtant, cette technique produit toujours son effet.
Des principes identifiés et éprouvés.
Pourquoi ? Cette technique se fonde à la fois sur plusieurs principes identifiés, démontrés et expérimentés par de nombreux ténors de la psychologie sociale.
- Réciprocité : le demandeur baisse ses prétentions et devant son effort, l’on se sent obligé d’accepter sa nouvelle requête.
- Culpabilité : le rejet de la première requête entraine une culpabilité de la part du sollicité. En acceptant la seconde proposition, il réduirait ainsi son sentiment de culpabilité.
- L’effet de contraste : admettre que la seconde proposition est très avantageuse par contraste avec la première et donc l’accepter.
- Sortir d’un climat tendu : le refus de la première demande crée une tension, en acceptant la seconde proposition, le sollicité pense pouvoir réduire cette tension qui lui est devenue insupportable et entretenue par l’attitude du sollicitant.
Concéder oui, céder sous la pression non.
Pour faire avancer une négociation, il faut savoir faire des concessions mais aussi savoir les valoriser et les échanger contre d’autres. Mais encore faut-il bien percevoir comment arrivent ces concessions et si en fait, elle ne sont pas l’objectif initial de la partie adverse, donc tout sauf de vraies concessions !
Vraie exagération, puis fausse modération.
« Dans notre culture, la réciprocité est une norme », écrit Serve Cicotti, Docteur en psychologie, « lorsque le quémandeur revient à la charge avec une demande plus limitée, cela a pour effet d’augmenter la pression sur l’autre personne afin qu’elle fasse à son tour une concession. Ainsi le psychologue invite à se méfier des demandes exagérées suivies de demandes plus modérées.
Concrètement…
Quelques exemples extraits de 150 petites expériences de psychologie de Serge Cicotti (Dunod) :
- Un surplus de travail, votre supérieur vous demande de travailler un week-end. Devant votre refus, il vous propose de rester plus tard ce soir. Vous l’accepterez plus facilement, que si cela vous avait été proposé d’emblée.
- Vous ne pouvez remettre un rapport un rapport en temps et en heure. Vous demandez un délai trois fois supérieur à celui que vous proposerez dans votre seconde requête.
- Un second devis revu à la baisse, après un premier exorbitant, sera également plus acceptable que s’il vous avait été d’abord présenté.
Ainsi mais sans tomber dans la paranoïa, faut-il parfois s’interroger sur la sincérité d’une concession qui semble en avoir le goût, mais qui n’a que l’amertume de la manipulation.
La parade.
Et comme un négociateur averti en vaut deux, la parade : refuser la seconde demande ou montrer que vous n’êtes pas dupe afin de revenir à des bases de négociation raisonnables pour les deux parties.
A porte au nez… nez creux !