C’est bien connu, le flou est sujet à interprétation et tout bon manipulateur n’hésite pas à jouer sur ce registre pour atteindre ses objectifs, bien sûr à vos dépens, notamment grâce aux omissions volontaires. Décryptage et parade.
En négociateur avisé, vous êtes attentif à tous les signaux que vous envoie consciemment ou inconsciemment votre interlocuteur. En effet, durant une négociation, ce sont des éléments d’information qui vous renseignent et influent en permanence sur le cours et la forme de la discussion.
Sur le fond, c’est une autre affaire : vous vous êtes assis à la table de négociation avec des objectifs clairement définis et annoncés. Vous êtes là pour les atteindre en trouvant un terrain d’entente ; s’il le faut, en accordant des concessions parfaitement valorisées… La bataille des arguments commence, attention à ne pas se laisser piéger par l’habile rhétorique d’un manipulateur potentiel.
De la digression à l’avalanche d’informations, de la généralisation trompeuse à la déformation de la réalité, votre interlocuteur peut chercher à vous noyer et à vous étourdir. La parade est simple : revenir au sujet proprement dit et ne pas se laisser abuser par ses « débordements » y compris émotionnels.
Le problème est différent quand votre interlocuteur s’évertue à être imprécis. Son idée : vous entrainer dans une interprétation hasardeuse, voire dans des schémas de culpabilisation et/ou de prise d’ascendant… en bref des fausses routes qui vous éloigneront de vos véritables objectifs.
L’une de ses tactiques : l’omission. Jean-Louis Muller dans « Déjouer les pièges de la manipulation pour les nuls » (First Editions, 22,95 €) dénombre quatre types d’omission.
- L’omission de l’objet : le manipulateur exprime un état et un sentiment, sans en préciser l’objet. Exemple : « je suis en colère ». Parade : déminer le terrain. Question à poser : contre qui, pourquoi ?
- L’omission du sujet : le manipulateur est imprécis en ne spécifiant pas le sujet dans ses énoncés. Exemple : « On ne m’écoute pas »… Le « on » a toujours bon dos ! Qui est-il ? Qu’est-ce qui n’a pas d’importance et pour qui ? Parade : faire préciser le sujet omis.
- L’omission du comparatif : un vendeur vous affirme que son produit n’est pas cher et que sa solution est la meilleure. Parade : peut-être, mais par rapport à quoi ? On ne compare pas en l’air mais avec du comparable !
- L’omission du verbe d’action : très fréquente souligne Jean-Louis Muller. Les verbes y sont plus ou moins imprécis. Exemple : « Cette information m’a étonné ». C’est vague. Parade : plutôt que le « pourquoi », opter pour le « comment précisément ». La réponse précisera l’action mise en jeu par le verbe.
Règle générale : ne pas se laisser entrainer par ces fausses pistes que sont les sous-entendus ; vous détectez une arrière-pensée, clarifiez-là ; en cas de doute, faites toujours préciser les pensées de votre interlocuteur, voire poussez-le dans ses derniers retranchements. En bref, restez aussi attentif que vigilant, et reformulez régulièrement et précisément… sans rien « oublier » !